Aristote est un touche-à-tout, un de ces penseurs multifonctions qui s’est intéressé tout autant à l’art, à la politique, à l’économie, aux sciences, à l’éthique, à la logique… L’élève de Platon impressionne par la diversité des sujets qu’il a abordés. Mais finalement, c’est un peu toujours la même méthode qu’il emploie, quel que soit le champ d’études : il fait des catégories.
Le Stagirite — ainsi nommé parce qu’il est né à Stagire en 384 avant Jésus-Christ — était fils de médecin. C’est peut être de son père qu’il tient son sens de l’observation et sa rationalité. Celui qui sera le fondateur du Lycée et le précepteur d’Alexandre le Grand développe en effet une méthode philosophique solide, fondée sur l’observation, et consistant à discerner des catégories au sein d’un ensemble.
Aristote part du réel, et distingue au sein de la réalité foisonnante de grandes catégories. Quand il s’intéresse à la littérature, il distingue la comédie, la tragédie, l’épopée et la parodie. Il voit deux genres nobles (épopée et tragédie) et deux genres mineurs (comédie et parodie). Il distingue les genres mimétiques (comédie et tragédie) et les genres diégétiques (épopée et parodie). La méthode d’Aristote consiste à classer les oeuvres en catégories.
Quand il s’intéresse à la matière, il reprend la théorie des quatre éléments issue d’Empédocle, en les classant sur l’échelle du chand et du froid, du sec et de l’humide. On le voit, là encore, le souci d’Aristote est d’expliquer le réel en faisant des catégories.
Quand il s’intéresse à la causalité, il distingue quatre causes. La théorie aristotélicienne de la causalité repose sur l’idée qu’un phénomène ne peut être pleinement compris qu’en identifiant quatre types de causes complémentaires. La cause matérielle désigne ce dont une chose est faite : le bronze d’une statue, le bois d’une table. La cause formelle correspond à la structure ou à l’essence de la chose : la forme de la statue, le plan de la maison. La cause motrice (ou efficiente) est ce qui produit le changement : l’artisan qui façonne l’objet, l’agent du mouvement. Enfin, la cause finale est la fin ou la fonction : l’usage de l’objet, le but qu’il vise. Ces quatre causes ne s’excluent pas mais se complètent, car pour Aristote un phénomène n’est vraiment expliqué que lorsque ses conditions matérielles, sa définition, son origine et son but sont éclairés ensemble. Là encore, on voit qu’Aristote procède par catégorisation.
Quand il s’intéresse à la politique, Aristote adopte la même méthode, consistant à classer la réalité au sein de catégories. Il distingure ainsi trois régimes viables (monarchie, aristocratie, politie) et trois régimes non viables (tyrannie, oligarchie, démocratie démagogique). Aristote ne cache pas sa préférence pour la politeia, un régime modéré où le pouvoir est partagé sans pour autant être dans les mains du peuple. Là encore, le génie d’Aristote est de résumer la grande diversité du réel à travers l’identification de catégories.
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Expliquer Aristote ne se fait pas en un article de blog. Je ne prétends pas même en être capable. Plus modestement, je propose une porte d’entrée qui m’a été utile : Aristote procède souvent par typologie. Face à un ensemble (les gouvernements, les œuvres d’art, les causes, etc.), il établit des sous-ensembles. Il catégorise, il classifie. Il me semble que comprendre cela aide à le lire.
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