Isabelle Adjani, marraine du Printemps des Poètes

Je viens de voir cette information. Isabelle Adjani sera la marraine du Printemps des Poètes 2026. Un choix que l’on peut discuter.

Grâce à Jack Lang à qui l’on doit également la Fête de la Musique, la poésie est mise à l’honneur, chaque année, en France, en mars, avec des milliers d’événements partout en France. C’est la seule fois, dans l’année, où la poésie est ainsi mise en avant, où on parle d’elle dans les grands médias nationaux, où l’on rappelle qu’il existe des poètes vivants et que ceux-ci ont un rôle politique essentiel au sein de la Cité. Pendant une quinzaine de jours, la poésie investit ainsi l’espace public, les écoles, les bibliothèques, les librairies, les lieux culturels, et d’autres espaces plus insolites.

Depuis quelques années, l’événement national se dote d’un parrain ou d’une marraine. On comprend l’intention : il s’agit de profiter de l’aura d’une célébrité pour amplifier la médiatisation du Printemps des Poètes. Mais les organisateurs ont tendance à choisir des personnalités médiatiques très connues : on se souvient de la polémique suscitée par le choix de Sylvain Tesson en 2024. Un choix qui a choqué d’autant plus que certaines prises de position de l’écrivain étaient peu en phase avec l’esprit du Printemps des Poètes. Son œuvre, largement tournée vers l’ego, l’exploit et la posture, dialogue peu avec la diversité des voix poétiques contemporaines.

Le choix d’Isabelle Adjani est sans doute beaucoup plus consensuel. Il s’agit d’une personnalité moins clivante. Pour autant, elle n’est pas connue en tant que poète. Le Printemps des Poètes persiste ainsi à mettre en avant des personnalités médiatiques qui n’ont que peu à voir avec la poésie, laissant ainsi dans l’ombre les poètes eux-mêmes.

Choisir un people plutôt qu’un poète, c’est occulter les poètes vivants, engagés, souvent précaires, qui font réellement la vitalité de la poésie aujourd’hui. Il n’y a qu’une seule grande manifestation nationale qui parle de poésie, et il faut encore que les poètes y soient invisibilisés par la communication nationale.

Isabelle Adjani est déjà connue du grand public. Elle a pour elle une carrière exceptionnelle sur laquelle il est inutile de revenir ici. En revanche, les poètes, eux, n’ont pas cette visibilité. Ils font dans l’ombre un travail essentiel : ils prennent soin de la beauté, ils donnent du souffle à la langue, ils sont la voix de ceux qui n’ont point de bouche, ils créent le récit qui unit les membres d’une société. Ils ne gagnent généralement pas d’argent de leurs livres, ou très peu, et vivent soit d’un travail alimentaire, soit des maigres subsides procurés par des interventions scolaires ou des résidences d’artiste. C’est eux qu’il faut mettre en avant.

Cela n’est sans doute pas voulu, mais je pense que les poètes, dans leur grande majorité, y verront une forme de mépris implicite pour leur travail patient, têtu et discret, alors que le Printemps des Poètes existe justement pour faire connaître les poètes vivants. Les gens verront sur les plateaux de télévision une figure qu’ils connaissent déjà, qui dira sans doute quelques très belles généralités sur la poésie, mais qui ne pourra pas témoigner de cette poésie vivante. De ce que c’est qu’être poète en 2026.

Bref, il est temps de vous laisser la parole. Que pensez-vous de ce choix ? Qui auriez-vous choisi pour parrainer la poésie ? L’espace des commentaires est à vous !



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Un commentaire sur « Isabelle Adjani, marraine du Printemps des Poètes »

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